dana hilliot<p>En songeant (j'en parlais hier) à ce Herbert Kickl, chef du FPÖ, qui est invité à former le gouvernement en Autriche, je repense à ce poème de Thomas Bernhard, "Manie de la persécution ?"</p><p><a href="https://climatejustice.social/@danahilliot/113783776823404193" rel="nofollow noopener" translate="no" target="_blank"><span class="invisible">https://</span><span class="ellipsis">climatejustice.social/@danahil</span><span class="invisible">liot/113783776823404193</span></a></p><p>Première publication : Die Zeit, Hambourg, 1er janvier 1982.<br>La rédaction avait prié cinq auteurs d’écrire un poème pour la fin de l’année. Les cinq poèmes étaient réunis sous le titre : « Trauer, die jetzt im Kalten spricht. Fünf deutsche Gedichte zum Jahresende » (« Tristesse qui s’exprime dans le froid. Cinq poèmes allemands pour la fin de l’année »).</p><p>"Lorsqu’à Hainburg<br>j’eus soudainement faim,<br>j’allai dans une auberge<br>et je commandai,<br>revenant de Cracovie,<br>un rôti de porc aux boulettes de pommes de terre<br>et une pinte de bière.<br>En traversant la Slovaquie<br>mon ventre s’était vidé.<br>Je discutai avec le patron,<br>il disait, ces Juifs polonais,<br>ils auraient dû les tuer tous<br>sans exception.<br>C’était un nazi.<br> <br>À Vienne j’allai à l’hôtel Ambassador<br>et je commandai un cognac,<br>un cognac de France naturellement,<br>un Martell par exemple, dis-je,<br>tout en discutant avec un peintre,<br>qui affirmait sans cesse au sujet de lui-même<br>qu’il était un artiste<br>et qu’il savait ce qu’était l’art,<br>alors que le reste du monde tout entier ignorait<br>ce qu’était l’art,<br>bientôt il s’avéra que<br>c’était un nazi.<br> <br>À Linz j’allai au café Draxelmayer<br>boire un petit café au lait<br>et je parlai avec le maître d’hôtel<br>du match de football Rapid Vienne contre LASK Linz<br>et le chef de rang disait<br>les joueurs du Rapid, il faudrait tous les gazer,<br>aujourd’hui Hitler aurait encore plus de boulot<br>que de son vivant,<br>bref il s’est avéré très rapidement que<br>c’était un nazi.<br> <br>À Salzbourg j’ai croisé mon ancien professeur de religion,<br>qui m’a dit droit dans les yeux<br>que mes livres<br>et tout ce que j’avais pu écrire jusqu’à présent<br>étaient du rebut,<br>mais qu’aujourd’hui on pouvait publier n’importe quel rebut,<br>à une époque comme la nôtre,<br>qui était fondamentalement ordurière,<br>sous le Troisième Reich, disait-il,<br>je n’aurais pu faire publier aucun de mes livres,<br>et il souligna que j’étais un salopard,<br>un chien hypocrite,<br>puis il mordit dans son sandwich au saucisson,<br>arrangea sa soutane en tirant dessus des deux mains,<br>se leva et partit.<br>C’est un nazi.<br> <br>D’Innsbruck j’ai reçu hier une carte postale<br>illustrée du petit toit d’or symbole de la ville,<br>et sur laquelle on lisait, sans plus d’explications :<br>Les gens comme toi devraient être gazés ! Tu ne paies rien pour attendre !<br>J’ai relu plusieurs fois la carte postale<br>et j’ai eu peur."</p><p><a href="https://climatejustice.social/tags/ThomasBernhard" class="mention hashtag" rel="nofollow noopener" target="_blank">#<span>ThomasBernhard</span></a> <a href="https://climatejustice.social/tags/Autriche" class="mention hashtag" rel="nofollow noopener" target="_blank">#<span>Autriche</span></a> <a href="https://climatejustice.social/tags/Nazi" class="mention hashtag" rel="nofollow noopener" target="_blank">#<span>Nazi</span></a></p>